Moi, ce que j'aime, c'est les monstres : Une œuvre monumentale qui redéfinit le roman graphique

 Dans le paysage foisonnant de la bande dessinée contemporaine, Moi, ce que j'aime, c'est les monstres d'Emil Ferris se distingue comme une œuvre d'art singulière et bouleversante qui transcende les frontières du genre. Ce premier tome, publié initialement en 2017, nous plonge dans un récit captivant qui mêle avec brio enquête policière, chronique sociale et exploration psychologique. Note exceptionnelle de 4.7/5 étoiles.

Illustration roman graphique Moi ce que j'aime c'est les monstres : jeune fille-louve dans Chicago années 60, style gothique au stylo bille par Emil Ferris


Un chef-d'œuvre graphique né de l'adversité

Emil Ferris n'a pas eu un parcours conventionnel vers la création de bandes dessinées. À l'âge de 40 ans, une infection du virus du Nil occidental l'a partiellement paralysée, l'obligeant à réapprendre à dessiner et à écrire. Cette expérience traumatisante a paradoxalement donné naissance à l'une des œuvres les plus innovantes du genre, dessinée entièrement au stylo à bille sur papier ligné.

Le style unique de Ferris, fait de hachures denses et de textures complexes, crée une atmosphère gothique saisissante qui rappelle les gravures du XIXe siècle tout en restant résolument contemporaine. Chaque page est un tour de force artistique qui demande plusieurs lectures pour en apprécier tous les détails.

Une intrigue complexe et fascinante

Chicago, 1968 : Un cadre historique riche

L'histoire se déroule dans le Chicago des années 1960, une ville marquée par les tensions raciales et sociales. À travers les yeux de Karen Reyes, une jeune fille de 10 ans qui se dessine elle-même en loup-garou, nous explorons les mystères entourant la mort de sa voisine, Anka Silverberg, une survivante de l'Holocauste.

Le contexte historique n'est pas un simple décor mais fait partie intégrante de l'histoire, tissant des liens profonds entre les horreurs du passé et les monstres, tant réels que métaphoriques, du présent.

Une exploration profonde de l'identité

Au cœur du récit se trouve une réflexion poignante sur l'altérité et l'acceptation de soi. Karen, notre narratrice préadolescente, trouve refuge dans l'univers des films d'horreur et s'identifie aux monstres qu'elle y découvre. Cette métaphore puissante permet d'aborder des thèmes complexes comme la sexualité, le racisme et la classe sociale avec une sensibilité remarquable.

Une narration innovante

Structure et temporalité

Le récit se déploie comme un carnet intime illustré, alternant entre différentes temporalités : l'enquête de Karen sur la mort d'Anka, les souvenirs de cette dernière durant la montée du nazisme, et le quotidien de la jeune fille dans le Chicago des années 1960. Cette structure complexe crée un effet de miroir fascinant entre les différentes époques et leurs "monstres" respectifs.

Un style visuel unique

L'utilisation du stylo à bille comme médium principal pourrait sembler limitative, mais Ferris en fait une force expressive extraordinaire. Les variations de texture et de densité créent une profondeur remarquable, tandis que les changements de style graphique marquent habilement les transitions entre les différentes strates temporelles du récit.

Thèmes et symbolisme

La monstruosité comme métaphore

L'œuvre explore la notion de monstruosité sous toutes ses facettes. Les "vrais" monstres ne sont pas ceux des films d'horreur que Karen affectionne, mais plutôt les préjugés, la haine et la violence ordinaire qui marquent tant l'histoire personnelle d'Anka que le quotidien de Chicago. La fascination de Karen pour les monstres devient ainsi une façon de comprendre et d'accepter la différence.

Art et résilience

L'art joue un rôle central dans le récit, non seulement comme médium narratif mais aussi comme thème. Les visites de Karen à l'Institut d'Art de Chicago et ses reproductions minutieuses d'œuvres célèbres témoignent du pouvoir de l'art comme refuge et moyen d'expression face à l'adversité.

Impact et reconnaissance

Dès sa sortie, Moi, ce que j'aime, c'est les monstres a été acclamé par la critique et a remporté de nombreux prix prestigieux, dont trois Eisner Awards. L'œuvre a également reçu le Fauve d'Or au Festival d'Angoulême 2019, consacrant sa place parmi les chefs-d'œuvre du roman graphique contemporain.

Conclusion : Une œuvre majeure du 21e siècle

Moi, ce que j'aime, c'est les monstres représente une avancée majeure dans l'art du roman graphique. Emil Ferris a créé une œuvre profondément originale qui repousse les limites du genre tout en restant accessible et émouvante. La note exceptionnelle de 4.7/5 étoiles reflète parfaitement la qualité extraordinaire de ce premier tome qui laisse le lecteur impatient de découvrir la suite.

Points forts

  • Style graphique unique et virtuose
  • Narration complexe mais parfaitement maîtrisée
  • Profondeur psychologique des personnages
  • Exploration nuancée de thèmes universels
  • Contexte historique richement documenté

Pour quel lecteur ?

Cette œuvre s'adresse aux amateurs de romans graphiques ambitieux, aux passionnés d'art et d'histoire, et à tous ceux qui apprécient les récits complexes mêlant l'intime et l'universel. La densité du propos et certaines thématiques adultes en font une lecture plus appropriée pour un public mature.

Informations pratiques

  • Auteur : Emil Ferris
  • Éditeur : Monsieur Toussaint Louverture
  • Format : 416 pages
  • Note moyenne : 4.7/5
  • Public : Adulte
  • Genre : Roman graphique, thriller psychologique
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